L'Avortement Thérapeutique Devient Légal en Principauté
A 21 h 30, hier soir, les conseillers ont légalisé l'avortement thérapeutique. : Photo Marc Mehran
jeudi 02 avril 2009
Les conseillers nationaux de la majorité et de l'opposition ont voté, hier soir, en bloc, pour la dépénalisation de l'interruption médicale de grossesse
A 21 h 30, hier soir, les conseillers ont légalisé l'avortement thérapeutique. : Photo Marc Mehran
jeudi 02 avril 2009
Les conseillers nationaux de la majorité et de l'opposition ont voté, hier soir, en bloc, pour la dépénalisation de l'interruption médicale de grossesse
La boîte trônait sur le bureau en arc de cercle de l'hémicycle. Une boîte bleue, toute simple, contenant... des préservatifs. Un objet incongru au coeur d'un parlement et pourtant... Cette boîte prenait tout son sens, hier soir, en plein débat sur le projet de loi visant à légaliser l'interruption médicale de grossesse. Laquelle a été validée à l'unanimité peu avant 21 h 30. Sous des applaudissements nourris. Cette boîte de préservatifs, amenée par Jean-François Robillon, conseiller national, de surcroît médecin, sonnait comme un défi. Une boîte pour rappeler, à l'évidence, les propos du pape sur les préservatifs.
Préservatifs dans l'hémicycle
Mais surtout une boîte pour fustiger les propos tenus par Monseigneur Barsi, l'archevêque de Monaco, dans notre édition de mardi. Et Jean-François Robillon de s'élever « contre les bien-pensants dogmatiques ».
Traits graves, verbe soigneusement choisi, l'assemblée a offert hier soir un visage déterminé. Tant dans les rangs de la majorité que de l'opposition. Des élus déterminés à se débarrasser « d'un archaïsme d'un autre temps », selon Anne-Poyard Vatrican. Jusqu'à hier soir, selon la loi monégasque, une femme violée méritait encore dix ans de prison si elle avortait en Principauté.
Il est peu d'écrire que les conseillers nationaux ont été choqués par les propos tenus avant-hier dans notre journal par Monseigneur Barsi. Tous l'ont exprimé. Choqués également par les propos du comité de bioéthique diocésain, dans notre édition d'hier. « Le point de vue de l'église catholique, sur la question de l'avortement, si j'ai du mal à le comprendre, je le respecte », a souligné Catherine Fautrier. « Mais pourquoi attendre la veille du vote du texte pour s'exprimer sur le sujet de manière aussi sévère et provocatrice, sinon pour jeter le trouble une dernière fois ! (...) La réalité, c'est qu'il y a un monde qui évolue et une église catholique qui reste malheureusement en marge de cette évolution, et je le regrette. » Et Catherine Fautrier de souligner : « Personne ne peut se mettre à la place de la femme enceinte confrontée avec son conjoint à un choix douloureux, qu'il soit celui de mettre fin à une grossesse désirée, ou celui d'élever un enfant lourdement affecté et handicapé. »
Peu avant, Stéphane Valeri, président du Conseil national, avait lui aussi évoqué un texte « singulièrement assombri par des expressions de dernière minute ». Le président a ensuite exhorté les conseillers : « Rassurez nos compatriotes sur notre dignité et notre capacité à ne pas tomber dans le piège qui nous est tendu. Nous pouvons être fiers de la méthode qui nous a permis d'arriver à ce texte. Elle répond en tout point à la volonté exprimée par notre prince souverain de mettre en place un groupe de travail en charge d'arriver de manière pondérée et équilibrée à ce résultat. Cette loi n'imposera rien aux femmes, mais leur donnera simplement le droit de choisir. »
Dans les gradins fournis du public, Monseigneur Fabrice Gallo, le curé de Sainte-Dévote, prenait consciencieusement des notes. Le ministre d'Etat, Jean-Paul Proust, avait en préambule souligné « que ces dispositions n'ont pas un objectif moral. Cela relève de la conscience de chacun et j'écoute à ce sujet avec beaucoup de respect le message de notre archevêque qui s'adresse à la conscience de chacun. Notre projet de loi a un objectif plus modeste... Il se contente de supprimer des sanctions pénales infligées par la société à la maman et au médecin dans des situations douloureuses bien précises. »
A 21 h 30, la messe était dite.
Grégory Leclerc
Monaco-Matin
Grégory Leclerc
Monaco-Matin